Plutôt que de relancer la millième interprétation de la gaffe l’équipe Drumpf avec le discours de Melania regardons un peu le contexte de Cleveland où se déroule la Convention Républicaine .

Les Conventions.
Devenue le moment charnière du processus électoral pour chacun des deux grands partis (et aussi sur un autre mode pour les deux petits : Verts et Libertariens) la Convention marque le passage du temps des primaires et caucus, locaux aux états, à celui de la campagne nationale. On sort de la Convention avec un ticket de candidats, Président et Vice-Président, établi et une plate-forme politique. Si le couple du ticket est contraignant, sauf accident grave du à des révélations sur le passé des personnes, la plate-forme ne l’est pas. La personnalité et les références politiques des deux candidats, dans le contexte d’une élection donnée, donnent des indications sur l’équilibre politique de la campagne tel qu’il résulte des opérations et tractations antérieures. Ces indications ne prennent leur sens qu’au vu de la campagne et ensuite  de la pratique du président élu avec son colistier.
Les Conventions des deux grands partis ont progressivement changé de fonction au fil des années 1980. Elles étaient le lieu de discussion entre milliers de délégués et dignitaires des partis, le lieu où se déterminaient ou se finalisait les alliances et où se désignait le candidat. Elles sont devenues le lieu de présentation du candidat à l’opinion, par l’intermédiaire de la télévision. Le candidat étant normalement choisi à l’issue du processus des caucus et des primaires, processus non exempt de tractations et marchandages entre les factions la COnvention devient essentiellement un spectacle. Ce changement a connu sa consécration en 1984 quand un candidat président sortant et ancien acteur, ne s’est même pas déplacé en personne à la Convention. Nancy Reagan a représenté son mari, déjà vieilli et fatigué. Ronald Reagan a fait une intervention vidéo à distance en conclusion de la première Convention entièrement scénarisée pour la démocratie télévisuelle. Cette année 2016 nous offre donc le spectacle inattendu de deux Conventions qui rompent avec la norme en usage. Chez les Républicains le peu qui apparait cohérent et stable dans le programme du trublion Trump ne correspond pas la ligne conservatrice classique du parti. le personnage inquiète même dans son propre parti. La sérénité de la Convention, à partir du 18 Juillet 2016, est loin d’être garantie. Chez les Démocrates l’irruption et surtout le succès d’un candidat affirmant des options de gauche a empêché de tourner en rond et à contraint à préparer le rassemblement par un débat réel sur la plate-forme politique de la campagne. Toutes les incertitudes ne sont pas levées par un accord minimale réel et fort pour battre Trump.

Cleveland, ville sous tension.
Une fois nommée capitale de la « Rust Belt », la ceinture de rouille symbolisant la zone industrielle autour des Grands Lacs, a été frappée par la désindustrialisation de la région. Elle est passée de la cinquième place par la population à la quarante-cinquième. Les dégâts sociaux y sont moins connus que ceux de Detroit ou de Chicago sans être moins graves. A sa grande époque la ville a connu des premières politiques. Carl Stokes fur en 1967 le premier noir maire d’une ville majeure. Dix ans plus tard Dennis Kucinich a été le plus jeune maire d’une grande ville du pays. J’ignorais tout de Dennis avant que Willie Nelson et Ani di Franco ne soutienne sa candidature à la primaire Démocrate en 2004. A peu près tout dans la personnalité et la manière sépare Dennis Kucinich de Bernie Sanders mais en 2004 et 2008 la gauche était bien présente aux primaires. Dennis a ensuite perdu son siège à la Chambre des Représentants à la suite du redécoupage électoral opéré en 2010 par la majorité Républicaine de l’état qui a fusionné deux circonscriptions Démocrates. Le grand fait d’arme de Dennis date de son mandat de maire. Trè stôt confronté à une offensive de financiers désireux de faire privatiser pour l’acheter la régie municipale d’électricité (« MuniLight ») il a refusé et tenu bon. Aujourd’hui les avis sont unanimes pour reconnaitre qu’il a fait économiser des millions de dollars à la ville et aux usagers, sans parler de la qualité de service. La vengeance n’a pas trainé. Parmi les acheteurs déçus se trouvaient certains des banquiers de la ville qui se sont empressé de refuser des crédits et ont mis la ville en faillite et fait porte rla responsabilité au maire. Dennis Kucinich y a perdu sa mairie mais pas sa combattivité.

Meurtrie par la désindustrialisation de toute la région, liée sans aucun doute à la mondialisation et aux accords de libre-échange, dont l’accord nord-américain (« NAFTA ») la ville est tombée dans l’anonymat des cités ordinaire du Mid-West. Les années 2000 ont apporté quelques bonnes nouvelles avec la création de coopératives qui ne peuvent aujourd’hui prétendre redonner à la ville tous les emplois perdus. Mais il se passe quelque chose à Cleveland et pas seulement le Trump-show.

On mesure assez mal le niveau de tension induit dans la ville par la Convention. Les services de police de la ville déjà sous surveillance fédérale se sont vus alloué des moyens exceptionnels par le gouvernement de plusieurs dizaines de millions de dollars. Trente millions sont destinés à la rémunération des personnels. Vingt autres millions ont été consacré à l’achat de matériels spécifiques de maintien de l’ordre dont certains ne sont pas connus. On parle de dispositifs LRADs (« Long Range Audio Devices ») capables de disperser une foule par émission de sons insupportables. Ces matériels, comme la plupart de ceux qui ont été commandés appartiennent à la gamme proprement militaire et ne font pas partie des attributs normaux de la police. Cette militarisation de la police en dit long sur la crainte des débordements ou des affrontements. Les autorisations de manifester accordées au non du Premier Amendement (droit à la libre expression) incluent les interdictions d’y venir avec des cordes, des bouteilles en verre ou des armes blanches mais le Second Amendement autorise le port d’arme dans cet état de l’Ohio où le port d’armes apparentes est autorisé.

Pour finit sur une note positive voici une photo de manifestant de « Black Live Matter » avec des policiers dans une rue de Cleveland. Ne désespérez jamais.