On donnait H.R. McMaster, le conseiller à la sécurité nationale de Donald Trump possiblement partant depuis quelques jours. Il est toujours là. Lieutenant général, stratège reconnu et respecté, ancien de la première guerre du Golfe il passe pour un des faucons raisonnés de Washington, en particulier focalisé sur le danger que représente l’Iran. Paradoxalement les généraux McMaster et James Mattis, le ministre de la Défense, sont apparus au cours de la première année de la présidence Trump comme des éléments modérateurs apportant sinon de la mesure du moins un peu de raison à la politique militaire. La parution récente de la Statégie Nationale de défense (NDS=National Defense Stategy) montre que les orientations de long terme demeurent interventionnistes, dans la logique d’un Donald Trump qui semble ne comprendre que la logique de la force armée et bien qu’il ait été élu sur un programme supposément différent.
Donald Trump a toujours présenté l’accord sur le nucléaire iranien comme un des plus mauvais traités jamais signés par son pays. On peut penser le contraire dans la mesure où il incarne une des rares tentatives de renverser la tendance dangereuse au Moyen-Orient en faisant d’un ennemi déclaré un futur allié comme l’expliquent Trita Parsi et Robert Scheer au cours de cet entretien.
Alors que la situation semble s’éclaircir en Corée, ce que Donald Trump pourrait faire valoir comme le succès de son attitude ferme et offensive, la Maison-Blanche parait en difficultés avec les incertitudes de l’enquête de Robert Mueller et la polémique sur les droits de douanes. La question de l’Iran pourrait redevenir un vecteur d’unité nationale autour du président. La prochaine échéance de renouvellement périodique de l’accord iranien ne tombe qu’en Mai (12/05) mais la Conférence sur la Sécurité de Munich pourrait fournir l’occasion de la mise en place des décisions de fait définitives. Les différentes parties occidentales signataires de l’accord vont s’y retrouver et devront se mettre d’accord sur une attitude commune.
Le ministre des Affaires Étrangères, Rex Tillerson a pu formuler dans un memorandum aux européens les souhaits des Etats-Unis d’Amérique de manière plus diplomatiques que ne l’aurait fait McMaster. Les trois demandes de base qu’il demande à ses partenaires européens d’approuver sont :
- L’intégration des missiles balistiques dans l’accord,
- Des extensions considérables des inspections, inopinées sur toutes les installations militaires iraniennes,
- L’extension indéfinie dans le temps de l’interdiction de l’enrichissement de l’uranium à l’Iran.
Si ces conditions ne sont pas remplies alors Donald Trump dénoncera l’accord le 12 Mai.
Ces demandes sont évidemment formulées pour être inacceptables par les iraniens.
- Le programme de missiles est essentiel à a sécurité du pays surtout au vu de l’agressivité d’Israël. On nous rejoue ici le psychodrame coréen et on tente de rendre illégitime le programme qui ne nous plait pas.
- Les iraniens ont relativement facilement accepté un niveau d’inspection que beaucoup auraient rejeté comme intrusif. La demande ressort de la provocation.
- La prolongation indéfinie de la contrainte n’a aucun sens. En 2030, à la fin de l’accord tel qu’il existe, le gouvernants actuels ne seront plus en place. La situation militaire, économique et technique aura largement évoluée sans que personne ne puisse prévoir comment.
L’attitude des européens devient donc le facteur clé. Peut-on s’attendre à ce qu’ils prennent le risque de défendre l’accord ? Évidemment pas. La faiblesse et le manque d’unité des partenaires européens ne risquent pas de s’améliorer sur un sujet aussi délicat.
La dénonciation ou la mise en sommeil de l’accord augmenteront l’incertitude dans la région où des acteurs de moins en moins contrôlables seront susceptibles de prendre de graves initiatives.
Israël se sentira d’autant plus libre d’agir, militairement, que le soutien de son parent américain lui est acquis de toutes façons et que son allié de fait dans la région depuis la déstabilisation provoquée par la destruction de l’Irak en 2003, l’Arabie Saoudite, sera ravie de l’aider au moins diplomatiquement. Dans la course à la domination régionale l’Arabie de Mohamed ben Salman ne peut que bien accueillir l’affaiblissement du principal rival.
Mais si la rupture de l’équilibre régional a déjà été acté depuis quinze ans une évolution de ce genre s’inscrit dans un contexte mondial’. Alors que la Russie affaiblie par le prix des principales ressources vendables (pétrole et gaz) est frappée par des santions économiques la Chine qui reste le premier consommateur d’énergie se prépare à lancer un marché du pétrole en yuans. L’organisation du monde que nous connaissons pourrait bien ainsi se transformer radicalement à terme. Dans un nouvel équilibre Est-Ouest un Iran répudié par l’Occident retrouverait sans doute un rôle essentiel de passeur.
Mes liens de travail :
https://www.truthdig.com/articles/trump-administration-commits-forever-war-iran-syria/
https://www.truthdig.com/articles/u-s-keeping-iran-enemy-audio/
https://www.salon.com/2018/03/04/team-trump-seems-bent-on-undoing-the-iran-deal-so-what-happens-next/
https://slate.com/news-and-politics/2018/01/trumps-generals-are-leading-him-into-hopeless-quagmires-in-afghanistan-and-syria.html
http://www.truth-out.org/news/item/43601-trump-s-national-defense-strategy-something-for-everyone-in-the-military-industrial-complex#15204341444891&action=collapse_widget&id=0&data=
https://fr.sputniknews.com/economie/201711121033851840-petrole-brut-contrats-terme-yuans-dollar/
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