DOMINIC77

Un peu de tout

Tag: TRUMP (page 5 of 6)

Corée du Nord, bravo les artistes.

Hier soir j’intercepte l’information in extremis et je me couche en pensant que chacun des deux présidents de Corée du Nord et des États-Unis d’Amérique peut chacun de son côté se dire qu’il a gagné une bataille.

Kim a obtenu une reconnaissance internationale accordée par son plus grand adversaire qui accepte la rencontre. Donald Trump peut faire valoir que sa fermeté tonitruante a amené l’autre à résipiscence.

Et ce matin je me lève en me demandant s’ils nous ont vraiment pris pour des imbéciles en jouant sur une scène de théâtre mondial orchestrée par les médias de toute la terre la montée dramatique d’un affrontement conçu pour se terminer par un hommage à leur intelligence.

Non que je pense que tout cela ait été une comédie organisée dans l’objectif d’aboutir à ce résultat. Et personne ne peut prédire ce qui sortira de la rencontre ni même où et si elle aura lieu.

Chacun a réaffirmé ses positions avec le plus grand sourire sans prendre en compte ce que dit l’autre car les positions restent contradictoires sur le fond. Si Kim dit mettre sur ma table la dénucléarisation de la Corée du Nord il est clair qu’il n’en est pas question car il ajoute qu ele prix à payer est la garantie de l’existence de non agression de son pays assuré d’une survie internationalement garantie. De son côté Trump maintient la posture avec les sanctions et l’objectif de justement de dénucléarisation.

Les enjeux ne doivent pas obscurcir l’importance du mécanisme qui nous a mené là. Donald Trump existe politiquement par sa présence médiatique et ses capacité de bateleur. Il doit maintenir la tension du spectacle politique pour continuer à exister. Il a trouvé en face un partenaire de jeu qui a parfaitement compris les règles. Si bien que ces duettistes ont pu faire monter les enchères chacun à sa manière sans perdre de vue les objectifs.

Donald Trump joue assez gros car pour la première fois sa compétence de négociateur suprême si vantée qu’il en a même fait l’argument de son principal livre et l’étendard de sa campagne est mise à l’épreuve. Alors qu’il s’adresse habituellement à la base de son électorat en priorité il parle maintenant à des spectateurs du  monde entier. Par exemple la mise en place des droits de douanes ne s’adressait pas aux économistes ou aux politiques  mais bien à ce noyau de 25-30 % d’irréductibles trumpistes. La mise en application de la domination (Make America Great Again) ne s’adresse pas seulement au pays mais prendra sa signification aux yeux du monde entier.

Kim de son côté travaille sans doute essentiellement à l’autre versant de son offensive politique, le rapprochement avec la Corée du Sud, entreprise de longue haleine pour laquelle il a besoin de temps et de calme dans la région.

Il faudra évidemment attendre la fin de la pièce pour savoir qui est le vainqueur même si pour l’instant les deux acteurs en retire chacun des bénéfices. Que Kim ait été à l’initiative et ait mené le jeu importera-t-il au baisser de rideau ?

Matin calme en Corée, tempête en vue en Iran ?

On donnait H.R. McMaster, le conseiller à la sécurité nationale de Donald Trump possiblement partant depuis quelques jours. Il est toujours là. Lieutenant général, stratège reconnu et respecté, ancien de la première guerre du Golfe il passe pour un des faucons raisonnés de Washington, en particulier focalisé sur le danger que représente l’Iran. Paradoxalement les généraux McMaster et James Mattis, le ministre de la Défense, sont apparus au cours de la première année de la présidence Trump comme des éléments modérateurs apportant sinon de la mesure du moins un peu de raison à la politique militaire. La parution récente de la Statégie Nationale de défense (NDS=National Defense Stategy) montre que les orientations de long terme demeurent interventionnistes, dans la logique d’un Donald Trump qui semble ne comprendre que la logique de la force armée et bien qu’il ait été élu sur un programme supposément différent.

Donald Trump a toujours présenté l’accord sur le nucléaire iranien comme un des plus mauvais traités jamais signés par son pays. On peut penser le contraire dans la mesure où il incarne une des rares tentatives de renverser la tendance dangereuse au Moyen-Orient en faisant d’un ennemi déclaré un futur allié comme l’expliquent Trita Parsi et Robert Scheer au cours de cet entretien.

Alors que la situation semble s’éclaircir en Corée, ce que Donald Trump pourrait faire valoir comme le succès de son attitude ferme et offensive,  la Maison-Blanche parait en difficultés avec les incertitudes de l’enquête de Robert Mueller et la polémique sur les droits de douanes. La question de l’Iran pourrait redevenir un vecteur d’unité nationale autour du président. La prochaine échéance de renouvellement périodique de l’accord iranien ne tombe qu’en Mai (12/05) mais la Conférence sur la Sécurité de Munich pourrait fournir l’occasion de la mise en place des décisions  de fait définitives. Les différentes parties occidentales signataires de l’accord vont s’y retrouver et devront se mettre d’accord sur une attitude commune.

Le ministre des Affaires Étrangères, Rex Tillerson a pu formuler dans un memorandum aux européens les souhaits des Etats-Unis d’Amérique de manière plus diplomatiques que ne l’aurait fait McMaster. Les trois demandes de base qu’il demande à ses partenaires européens d’approuver sont :

  • L’intégration des missiles balistiques dans l’accord,
  • Des extensions considérables des inspections, inopinées sur toutes les installations militaires iraniennes,
  • L’extension indéfinie dans le temps de l’interdiction de l’enrichissement de l’uranium à l’Iran.

Si ces conditions ne sont pas remplies alors Donald Trump dénoncera l’accord le 12 Mai.

Ces demandes sont évidemment formulées pour être inacceptables par les iraniens.

  • Le programme de missiles est essentiel à a sécurité du pays surtout au vu de l’agressivité d’Israël. On nous rejoue ici le psychodrame coréen et on tente de rendre illégitime le programme qui ne nous plait pas.
  • Les iraniens ont relativement facilement accepté un niveau d’inspection que beaucoup auraient rejeté comme intrusif. La demande ressort de la provocation.
  • La prolongation indéfinie de la contrainte n’a aucun sens. En 2030, à la fin de l’accord tel qu’il existe, le gouvernants actuels ne seront plus en place. La situation militaire, économique et technique aura largement évoluée sans que personne ne puisse prévoir comment.

L’attitude des européens devient donc le facteur clé. Peut-on s’attendre à ce qu’ils prennent le risque de défendre l’accord ? Évidemment pas. La faiblesse et le manque d’unité des partenaires européens ne risquent pas de s’améliorer sur un sujet aussi délicat.

La dénonciation ou la mise en sommeil de l’accord augmenteront l’incertitude dans la région où des acteurs de moins en moins contrôlables seront susceptibles de prendre de graves initiatives.
Israël se sentira d’autant plus libre d’agir, militairement, que le soutien de son parent américain lui est acquis de toutes façons et que son allié de fait dans la région depuis la déstabilisation provoquée par la destruction de l’Irak en 2003, l’Arabie Saoudite, sera ravie de l’aider au moins diplomatiquement. Dans la course à la domination régionale l’Arabie de Mohamed ben Salman ne peut que bien accueillir l’affaiblissement du principal rival.

Mais si la rupture de l’équilibre régional a déjà été acté depuis quinze ans une évolution de ce genre s’inscrit dans un contexte mondial’. Alors que la Russie affaiblie par le prix des principales ressources vendables (pétrole et gaz) est frappée par des santions économiques la Chine qui reste le premier consommateur d’énergie se prépare à lancer un marché du pétrole en yuans. L’organisation du monde que nous connaissons pourrait bien ainsi se transformer radicalement à terme. Dans un nouvel équilibre Est-Ouest un Iran répudié par l’Occident retrouverait sans doute un rôle essentiel de passeur.

Mes liens de travail :

https://www.truthdig.com/articles/trump-administration-commits-forever-war-iran-syria/

https://www.truthdig.com/articles/u-s-keeping-iran-enemy-audio/

https://www.salon.com/2018/03/04/team-trump-seems-bent-on-undoing-the-iran-deal-so-what-happens-next/

https://slate.com/news-and-politics/2018/01/trumps-generals-are-leading-him-into-hopeless-quagmires-in-afghanistan-and-syria.html

http://www.truth-out.org/news/item/43601-trump-s-national-defense-strategy-something-for-everyone-in-the-military-industrial-complex#15204341444891&action=collapse_widget&id=0&data=

https://fr.sputniknews.com/economie/201711121033851840-petrole-brut-contrats-terme-yuans-dollar/

Peut-on voir clair dans le brouillard russe de la Maison-Blanche-2

Après l’élection.

Le groupe Kushner de  nouveau dirigé par le père après la nomination de Jared, gendre de Donald Trump, comme conseiller de son beau-père a toujours autant besoin de refinancer ses projets immobiliers, en particulier un immeuble de Chicago dont le prêt arrive à expiration au printemps 2017 et surtout le méga-projet de Manhattan au 666 Fifth Avenue.

La séquence de la transition.

Juste avant l’élection  le groupe Kushner emprunte 285 Millions de dollars à la Deutsche Bank, soutien financier habituel de la famille Trump.

L’équipe de transition se met en place en Novembre. Michael Flynn en fait partie comme Carter Page. Paul Manafort n’apparait plus. Ils font aussi  partie des personnages surveillés par le FBI dans le cadre de l’enquête sur l’ingérence russe.

1/12/2016 Flynn rencontre Kislyak, l’ambasadeur russe, avec Kushner à la Trump Tower. Ce dernier sollicite une ligne directe sécurisée avec le pouvoir russe utilisant l’infrastructure de l’ambassade. Il expliquera plus tard avoir voulu ainsi faciliter le travail de transition mais cela reste un geste inhabituel pour un président élu de vouloir utiliser les services d’un pays étranger avec lequel on n’entretient de très bonnes relations.

8/12/2016 Carter Page rencontre la direction de Rosneft dans laquelle les russes avaient à l’été proposé de vendre une participation de 19 %. Il part ensuite à Londres rencontrer les dirigeants de Gazprom en principe au sujet de projets au Kazakhstan mais la maison mère de Gazprom, Gazprombank est le financier principal de toute la filière pétrolière russe dont Rosneft. Lors des interrogatoires Page a nié avoir rencontré le patron de Rosneft mais admis avoir parlé des sanctions avec d’autres responsables.

9/12/2016 Les russes annoncent le plus « deal » jamais conclu dans l’industrie pétrolière russe. Il s’agit de la vente de 19,5 % de Rosneft à des investisseurs étrangers dont Glencore et surtout un groupe qatari financé en partie par une banque italienne, Indesa. Le montant s’élèverait à 11,3 Milliards de dollars. Les russes s’engagent à verser des dividendes à un niveau (35% des profits nets) jamais vu dans leurs compagnies. Le besoin de desserrer l’étau des sanctions apparait ici clairement.

13/12/2016 Kushner rencontre Gorkov, patron de la VEB, banque appartenant à l’état russe et bras armé des actions financières de Poutine qui est gérée en dehors du budget de l’état. La VEB est alors déjà sous sanctions américaines.

14/12/2016  Gorkov file au Japon pour rencontrer Poutine.

29/12/2016 L’administration Obama toujours en psoset annonce des sanctions nouvelles contre les russes motivées par l’ingérence dans l’élection à la suite de l’enquête diligentée en été.

4/01/2017 Flynn dit à McGhan, avocat de Trump qu’il est sous investigation. Il est maintenu à son poste de conseiller à la Sécurité du président et reçoit ses accréditations (provisoires) pour avoir accès aux documents top-secret. La pratique systématique des accréditations provisoires est courante au changement d’administration mais Trump en a usé et abusé à l’extrême, en particulier pour son gendre qui avait peut-être des choses à cacher.

9/01/2017 Kushner est nommé Conseiller senior du président. Il sera ensuite chargé de très nombreux dossiers mais ceci est une autre histoire. Dans sa déclaration de demande d’accréditations il omet ses rencontres avec les russes avant et après l’élection. Ces omissions lui seront plusieurs fois reprochées par la suite et lui vaudront l’annulation de son accès top-secret en Février 2018.

15/01/2017 Mike Pence, vice-président élu nie que Flynn discuté des sanctions avec l’ambassadeur russe. Ce dernier sera opportunément rappelé à Moscou quelques mois plus tard et est maintenant hors d’atteinte.

16/01/2017 Kushner reçoit ses accréditations (provisoires).

26/01/2017 Sally Yates, la ministre de la justice nommée par Obama agissant en intérim avant la confirmation de la nomination du ministre de Trump alerte le cabinet sur le danger que représente Michael Flynn et ses liens russes. Flynn est confirmé mais sera contraint à la démission début Février. Avec cette démission s’enclenche le mécanisme infernal. Donald Trump, en monarque de droit divin, demandera à James Comey de laisser tomber l’enquête sur Flynn. Comey refusera, sera licencié. Etc…

En Février-Mars le groupe Kushner approche un assureur chinois, Anbang, pour solliciter un prêt de l’ordre de 500 Millions de dollars. L’affaire étant rendue publique le risque de conflit d’intérêt apparait au grand jour et cela n’aboutit pas. Il est clair que le besoin de financement de Kushner est toujours aussi aigu.

En Mars Citigroup accorde au groupe Kushner un prêt de 325 Millions de dollars.

En Avril Kushner approche des qatari à la recherche d’argent frais, sans résultat.

En Juin commence l’affrontement arabo-arabe entre d’une part l’Arabie Saoudite et les Émirats  et d’autre part le Qatar. Washington soutient le camp saoudien malgré le ministre des affaires étrangères Rex Tillerson, ex patron d’Exxom-Mobil et expert en relations pétrolières.

En Novembre 2017 Appolo Group Management dont l’actionnaire principal est le fond souverain qatari prête 184 Millions de dollars au groupe Kushner pour relayer un prêt arrivant à expiration sur un immeuble de Chicago. Il semble donc que le problème du 666 Fifth Avenue soit resté entier.

On peut se demander « Tout ça pour ça ? »

Si on se laisse aller à une première réaction rapide. Risquer d’embraser le Moyen-Orient pour au final se faire prêter « seulement » 184 dérisoires millions.

La séquence ne manque pas d’être troublante et on ne peut se manquer de se demander si suivre l’argent n’est pas une clé plus pertinente pour comprendre au moins une partie du monde de Trump. Nous avons tendance à penser stratégie, avenir du monde, politique.

Aurions-nous tort ?

Josh Marshall de Talking Point Memo a résumé la problématique dans ce schéma qu’il convient de prendre comme une explication, pas une preuve.

whitechart

 

 

Mes liens de travail sur ce billet :

02/03/2018

https://www.alternet.org/news-amp-politics/mueller-wikileaks-foundation-russia-case

https://www.salon.com/2018/03/02/an-ivanka-trump-business-deal-is-now-being-probed-by-the-fbi/

https://thinkprogress.org/jump-back-whats-that-sound-6c72cdbc03e3/ //De mal en pis au Panama pour la famille Trump

https://www.salon.com/2018/02/28/what-did-donald-trump-know-about-stolen-wikileaks-emails/

https://www.salon.com/2018/02/22/trumps-source-of-inspiration-paul-manaforts-dark-deeds-and-dubious-clients/

https://www.washingtonpost.com/politics/jared-has-faded-inside-the-28-days-of-tumult-that-left-kushner-badly-diminished/2018/03/02/62acb9ce-1ca8-11e8-9de1-147dd2df3829_story.html?utm_term=.71a21c38eb7e //The day of the kushner house fall The fall of the house of USher

https://edition.cnn.com/2018/03/01/politics/ivanka-trump-fbi-investigation/index.html?CNNPolitics=Tw

03/03/2018

http://thehill.com/homenews/administration/376534-the-memo-white-house-reels-after-week-of-upheaval

https://slate.com/news-and-politics/2018/03/a-series-of-revelations-about-jared-kushner-have-added-further-credence-to-a-key-claim-of-the-steele-dossier.html //L’affaire Kuschner
https://uk.reuters.com/article/uk-russia-rosneft-privatisation/russia-signs-rosneft-deal-with-qatar-glencore-idUKKBN13Z0Q7 //Rosneft privatisation Qatar, Glencore Intesa 19,5% 11,3 B$ + dividendes à 35% des bénéfices.
http://www.businessinsider.fr/us/carter-page-trump-russia-igor-sechin-dossier-2017-1 //Les 19 % de Rosneft se baladent de Juin 2016 à Décembre pour finir au Qatar.

https://www.bloomberg.com/view/articles/2017-03-29/senators-please-ask-jared-kushner-about-666-fifth-avenue

https://www.vox.com/policy-and-politics/2018/3/2/17068392/trump-news-hope-hicks

https://www.salon.com/2018/03/03/closing-the-circle-of-collusion/ Closing the circle of collusion Lucian Truscott IV
04/03/2018
0.000660720185001652https://talkingpointsmemo.com/edblog/with-kushner-revelations-the-worst-case-scenario-comes-into-view //Josh Marshall summary.

https://www.motherjones.com/kevin-drum/2017/05/kushnergate-update-was-it-really-all-about-syria/

https://www.motherjones.com/politics/2018/01/deutsche-bank-reports-suspicious-activity-related-to-jared-kushners-accounts-1/

https://www.theatlantic.com/politics/archive/2018/03/conservatives-are-losing-the-culture-war-over-guns/554585/

https://www.vox.com/2018/2/26/16964328/trump-tower-meeting-mueller-russia

https://www.vox.com/2018/2/26/16964328/trump-tower-meeting-mueller-russia

https://www.npr.org/sections/thetwo-way/2018/03/04/590660482/at-gridiron-dinner-trump-trades-jabs-with-his-opposition-party

http://thehill.com/homenews/administration/376436-kushner-family-company-solicited-qatari-government-investment-just

https://slate.com/news-and-politics/2018/03/benjamin-wittes-on-why-we-hear-so-much-but-know-so-little-about-the-mueller-russia-investigation.html

https://www.motherjones.com/kevin-drum/2018/03/jane-mayer-trump-team-was-in-routine-communication-with-moscow-in-2016/ //Infos britanniques sur 2016.

https://www.recode.net/2018/3/5/17081520/reddit-russia-2016-election-ads-organic-content

https://www.vox.com/policy-and-politics/2018/3/5/17080302/trump-russia-news-kushner-mueller //LEs associés de Trump vont y passer

Peut-on voir clair dans le brouillard russe de la Maison-Blanche-1

La semaine passée (Semaine 9/2018) a vu déferler les nouvelles autour de la Maison-Blanche. Après le départ de Rob Porter pour violences conjugales passées et sur fond de débat houleux autour de la question des armes à feu Hope Hicks, petite amie présumée de Porter et proche de Donald Trump a annoncé son départ sans que les raisons en soient claires. Ce manque de clarté a évidemment alimenté les rumeurs qui ne manquaient pas. En même temps de nouvelles informations publiées par le New-York Times ont attiré l’attention sur des événements que le tumulte trumpien avait remisé au hangar des souvenirs enfouis. L’abondance de matière à discuter rend difficile la compréhension d’une situation qui évolue de manière désordonnée. Prendre le temps de poser quelques repères et prendre du recul devient nécessaire pour mieux distinguer ce qui se cachait pourtant en pleine lumière.

Ces nouvelles informations complètent ce qui était déjà connu et permettent de tracer un schéma clair de ce qui s’est passé à plusieurs moments clés des années passées. Deux périodes présentent un intérêt particulier : le printemps-été 2016 quand la tendance des élections primaires montre que Donald Trump est en bonne voie pour gagner d’une part et la période de la transition entre l’élection de Novembre et la prise de fonction fin Janvier d’autre part.

Printemps-été 2016 : les contacts russes.

La période est résumée par plusieurs articles dont celui-ci. A partir d Mars 2016 le succès de Donald Trump devient une hypothèse vraisemblable. Il crée alors une cellule internationale dans son équipe de campagne avec Carter Page et Georges Papadopoulos.

26/04/2016 Georges Papadopoulos reçoit l’information que les russes détiennent des informations dommageables pour Hilary Clinton.

01/06/2016 Papadopuolos avise le directeur de la campagne Corey Lewandoski que les russes sollicietnt une rencontre.

03/06/2016 Donald Trump fait l’éloge des Russes lors d’un meeting en Californie. Donald Trump Junior reçoit un mail lui offrant une réunion pour discuter d’infomations dommageables pour Hilary Clinton. Il répond  « j’adore ».

07/06/2016 Donald Trump annonce des révaélations sur Hilary Clinton pour la semaine suivante.

09/06/2016 : la famuse réunion organisée par Rob Goldstone vieille connaissance de Donald Trump à la Trump Tower rassemble Donald Junior, Paul Manafort et Jared Kushner qui rencontrent les envoyés russes parmi lesquels les Agalarov pére et fils, également partenaires antérieurs de Donald Trump, Natalia  Veselnitskaya, avocate russse proche du Kremlin et plusieurs autres personnes. Initialement provoquée par l’offre des russes de livrer les informations su Clinton la réunion aurait été décevante et sans contenu aux dires des participants du camp Trump.

15/06/2016 Un hacker russe (Guccifer 2.0) commence la publication des mails piratés à la Commission Nationale Démocrate. Un responsable républicain (Kevin McCarthy) affirme la préférence de Poutine pour Trump (et le député de Californie Dana Rorabacher).

19/06/2018 Papadopoulos propose à ses supérieurs de la campagne Trump l’aide des russes et offre de faire le voyage pour  prendre des contacts « off the record ».

20/06/2016 Trump limoge le directuer de campagne puis nomme à sa place Paul Manafort connu pour ses contacts russes et ukrainiens. Manafort sera l’entremetteur entre Trump et Mike Pence pour la vice-présidence. Manafort aurait été aux manettes depuis Avril d’après Lewandoski.

05/07/2016 James Comey clmot l’enquête du FBI sur les mails de Clinton. Cela lui vaudra la vindicte de Trump.

06/07/2016 Les russes continuent la publication des mails piratés à la Commission Nationale Démocrate sans rien de dramatiquement compromettant.

07/07/2016 Manafort offre à un contact russe depuis son compte de la campagne de donner des informations sur la campagne Trump à un de ses partenaires russes, à qui il doit 19 Millions de dollars. Le même jour Carter Page se rend à Moscou pour tenir un discours pro-russe et rencontre un dirigeant de la compagnie pétrolière russe Rosneft. Ces rencontres et les discussions de la campagne contre Clinton sont semble-t-il confirmées par plusieurs sources et ont causé l’enquête du FBI sur Page et la campagne Trump.

14/07/2016 Papadopoulos envoie un mail à un officiel de lié au Kremlin que la campagne Trump est d’accord pour une rencontre entre un représentant de la campagne et des envoyés du gouvernement russe. Les aides de Trump font modifier la plate-forme du Parti Républicain sur l’Ukraine dans un sens pro-russe.

18/07/2016 A la Convention Républicaine Jeff Sessions, conseiller de Trump pour les affaires internationales rencontre en privé l’ambassadeur russe Serge Kysliak. Carter et Gordon, deux autres conseillers de Trump le rencontrent aussi.

24/07/2016 Paul Manafort nie dans un entretien télévisé sur ABC tout contact avec les russes.

25/07/2016 Trump se vante que Poutine l’aime bien.

31/07/2016 Le FBI ouvre l’enquête sur les liens de la campagne avec la Russie après réception d’informations communiquées par les services australiens. Papadopoulos aurait  affirmé devant l’ambassadeur à Londres que les russes allaient publier les emails compromettant de Clinton.

La séquence est d’autant plus troublante que sur les cinq personne surveillées par le FBI depuis ce moment trois ont décidé de plaider coupable et donc collaborent avec les enquêteurs. les motifs de leurs inculpations peuvent ne pas être liés à la collusion entre la campagne et les russes.

Les enjeux des uns et des autres.

Le tableau ne deviendra clair que si on éclaire les motivations des acteurs au-delà de l’élection.

Les Russes en 2016, après la crise ukrainienne souffrent de la baisse du prix du pétrole qui diminue dramatiquement leurs ressources. Les sanctions qui les frappent sont donc malvenues. Leur priorité  cette période est de parvenir à les contourner ou les faire diminuer ou annuler. Dans cette perspective avoir un allié au pouvoir à Washington présente un intérêt majeur. Mais que peuvent-ils lui offrir en échange ?

Sans entrer dans les détails scabreux du Dossier Steele et de ce que l’on a raconté autour qui laissait entrevoir la possibilité de vidéos infamantes pour Donald Trump personnellement il existe d’autres pistes plus consistantes.

On sait le groupe Trump solidement endetté, en particulier auprès de la Deustsche Bank, ce qui pose un problème de conflit d’intérêt, mais pas au point de devoir rechercher de nouveaux financements.

Par contre le gendre est dans de sales draps. L’empire immobilier de la famille Kushner est empêtré dans l’affaire du 666 Fifth Avenue à New-York. Jared est devenu le patron du groupe après la condamnation en justice de son père avant de quitter la direction pour prendre ses fonctions à la Maison-Blanche. Il a acheté cet immeuble pour 1,8 Milliards de dollars en 2007, juste avant la crise qui l’a pris au dépourvu. Il a donc emprunté pour le  rénover. La dette de 1,4 Milliards arrive à échéance en 2019. La groupe Kushner est donc à la recherche de grosse sommes d’argent qui se comptent en centaines de millions de dollars.

Demain la période Novembre 2017-Janvier 2018.

 

Mes liens de travail sur le sujet.

01/03/2018

http://thehill.com/homenews/administration/376132-kushners-future-is-uncertain-but-few-think-hes-leaving-white-house

http://thehill.com/homenews/administration/376166-mercedes-schlapp-is-possible-hope-hicks-replacement-report

https://www.theatlantic.com/politics/archive/2018/02/the-rules-are-there-to-protect-you-not-hurt-you/554486/

https://www.theatlantic.com/politics/archive/2018/02/diogenes-on-the-potomac/554240/

https://www.motherjones.com/kevin-drum/2018/02/hope-hicks-is-the-latest-to-abandon-a-sinking-ship/

http://thehill.com/homenews/administration/376283-trumps-family-becomes-flashpoint-for-new-controversies

http://thehill.com/opinion/white-house/376215-trump-loyalists-flee-the-white-house-as-anti-trump-wave-builds

http://thehill.com/homenews/house/376266-pelosi-jared-kushner-needs-to-go

https://fivethirtyeight.com/features/the-midterms-could-set-trump-on-a-path-toward-impeachment/

https://talkingpointsmemo.com/livewire/nbc-white-house-preparing-to-oust-mcmaster-as-national-security-adviser

https://www.motherjones.com/politics/2018/03/trump-just-suggested-again-that-drug-dealers-should-get-the-death-penalty/

https://www.vox.com/policy-and-politics/2018/3/1/17053398/jared-kushner-scandals-russia-clearance-loans

https://www.salon.com/2018/03/01/trump-makes-good-on-promised-trade-war-dow-plummets/

https://www.alternet.org/news-amp-politics/melania-trump-immigrated-us-under-eb-1-genius-visa

https://www.salon.com/2018/02/10/conniving-lying-conspirators-or-bumbling-lying-fools-you-decide/

https://www.axios.com/the-wild-wars-within-the-trump-white-house-1519905402-f84fb393-4789-44ed-a8a1-0f846b1580af.html

https://www.nytimes.com/2018/03/01/us/politics/trump-chaos-oval-office.html

02/03/2018

https://www.alternet.org/news-amp-politics/mueller-wikileaks-foundation-russia-case

https://www.salon.com/2018/03/02/an-ivanka-trump-business-deal-is-now-being-probed-by-the-fbi/

https://thinkprogress.org/jump-back-whats-that-sound-6c72cdbc03e3/ //De mal en pis au Panama pour la famille Trump

https://www.salon.com/2018/02/28/what-did-donald-trump-know-about-stolen-wikileaks-emails/

https://www.salon.com/2018/02/22/trumps-source-of-inspiration-paul-manaforts-dark-deeds-and-dubious-clients/

https://www.washingtonpost.com/politics/jared-has-faded-inside-the-28-days-of-tumult-that-left-kushner-badly-diminished/2018/03/02/62acb9ce-1ca8-11e8-9de1-147dd2df3829_story.html?utm_term=.71a21c38eb7e //The day of the kushner house fall The fall of the house of USher

https://edition.cnn.com/2018/03/01/politics/ivanka-trump-fbi-investigation/index.html?CNNPolitics=Tw

03/03/2018

http://thehill.com/homenews/administration/376534-the-memo-white-house-reels-after-week-of-upheaval

https://slate.com/news-and-politics/2018/03/a-series-of-revelations-about-jared-kushner-have-added-further-credence-to-a-key-claim-of-the-steele-dossier.html //L’affaire Kuschner

https://www.vox.com/policy-and-politics/2018/3/2/17068392/trump-news-hope-hicks

https://www.salon.com/2018/03/03/closing-the-circle-of-collusion/ Closing the circle of collusion Lucian Truscott IV
04/03/2018

https://www.motherjones.com/kevin-drum/2017/05/kushnergate-update-was-it-really-all-about-syria/

https://www.motherjones.com/politics/2018/01/deutsche-bank-reports-suspicious-activity-related-to-jared-kushners-accounts-1/

https://www.theatlantic.com/politics/archive/2018/03/conservatives-are-losing-the-culture-war-over-guns/554585/

https://www.vox.com/2018/2/26/16964328/trump-tower-meeting-mueller-russia

https://www.vox.com/2018/2/26/16964328/trump-tower-meeting-mueller-russia

https://www.npr.org/sections/thetwo-way/2018/03/04/590660482/at-gridiron-dinner-trump-trades-jabs-with-his-opposition-party

http://thehill.com/homenews/administration/376436-kushner-family-company-solicited-qatari-government-investment-just

https://slate.com/news-and-politics/2018/03/benjamin-wittes-on-why-we-hear-so-much-but-know-so-little-about-the-mueller-russia-investigation.html

https://www.motherjones.com/kevin-drum/2018/03/jane-mayer-trump-team-was-in-routine-communication-with-moscow-in-2016/ //Infos britanniques sur 2016.

https://www.recode.net/2018/3/5/17081520/reddit-russia-2016-election-ads-organic-content

https://www.vox.com/policy-and-politics/2018/3/5/17080302/trump-russia-news-kushner-mueller //LEs associés de Trump vont y passer

 

Parmi les collaborateurs proches de Donald Trump à la Maison-Blanche la liste de ceux qui sont partis dépasse en nombre celle de ceux qui restent.

Hope Hicks,
Keith Schiller,
Steve Bannon,
Reince Priebus, président du Comité National Républicain devenu « chief of statff » à la Masison-Blanche  en Novembre 2016, éjecté en Juillet 2017 pour être remplacé par John Kelly
Katie Walsh, éjectée en Mars 2017,
Rob Porter,
Sean Spicer,
Dina Powell,
Michael Flynn, démissisoné en Février 2017,
KT McFarland, adjointe de Flynn, déposée en Avril 2017 pour devenir ambassadeur à Singapour, elle renoince en Février 2018 devant la difficulté à faire valider sa désignation par le Sénat.

Stephen Miller, représentant de la tendance « nationalistes blancs » auprès de Trump, vu comme le seul représentant extrémiste auprès de Trump après le départ Bannon et de Gorka.
Don McGahn,
Kellyanne Conway, arrivée en fin de campagne 2016 mais mise en retrait de la communication publique
Gary Cohn, peut-être en partance après l’annonce des hausses de droits de douane,
Mick Mulvaney, émanantion du Freedom Caucus (Tea Party) auprès de Trump,
Marc Short, en poste auprès de Trump depuis Janvier 2017.

Après Parkland, Trump tiendra-t-il promesse ?

Donald Trump a donc pris ses amis à contre pied en insistant sur l’importance d’une évolution significative de la réglementation sur les armes à feu. Dans cette incertitude quelques sénateurs tentent de sortir par le haut en formulant des projets de lois.

Si les Républicains ont en général mal réagi les Démocrates assez étonnés ont fini par adopter une ligne exprimée par Chuck Schumer, leur leader au Sénat qui consiste en gros à dire à Trump « Chiche ». Ils avancent une stratégie en trois points.

  1. De solides contrôles à l’achat qui bouchent les trous du système actuel en particulier sur les transactions dans les foires aux armes et sur Internet. Si ce point est un casus bellli avec la NRA il  peut éventuellement emporter l’accord d’un nombre suffisant de parlementaires Républicains si le leadership nouveau de Donald Trump sur le parti a une réelle influence.
  2. Autoriser la saisie, même temporaire,des armes détenues par des personnes que leur famille ou les autorités jugent dangereuses. Cette proposition est assez habile car elle rejoint celles de Trump sur la santé mentale et sera difficile à contrer.
  3. Obtenir un débat parlementaire sur l’interdiction des armes semi-automatiques. Ici encore l’habileté tactique l’emporte. LE débat est plus important que son résultat. Il atteste de la détermination des Démocrates et permettrait de mettre  en évidence les divisions du camp Républicain.

Donald Trump joue assez gros dans cette affaire car son leadership ne permet sans doute pas de faire taire les divergences au sein de son propre parti. S’il avance trop loin dans la direction du contrôle de l’achat, la détention, le transport et l’usage des armes à feu il prend à revers son propre électorat en particulier dans les états ruraux. Or le soutien de sa base est crucial pour que le parti continue à se ranger derrière lui.

La réaction des élus Républicains commence à se structurer et à agir. Les élus de Géorgie viennent de voter une disposition qui prive Delta Airlines d’une baisse d’impôt parce que la compagnie a rompu avec la NRA. Les suites seront intéressantes. D’autres collectivités dirigées par les Républicains suivront-elles ? Quelle sera la réaction de Delta ? Cela stoppera-t-il les ruptures de contrats commerciaux avec la NRA ?

Au Congrès aussi les choses se précisent. Les Républicains semblent avoir la conviction qu’ils leur suffit de faire le gros dos et que la tempête se calmera comme les autres se sont calmées lors des précédents massacres. Mitch McCOnnell, le leader Républicain du Sénat a donc programmé pour la semaine prochaine les débats sur la réglementation bancaire, en clair la suite du démontage du peu de régulation de la finance qui existe encore (Dodds-Franck). Cela aura le double avantage de ressouder le parti sur un thème unificateur et de gagner du temps. Pour ne pas donner l’impression de se désintéresser de la question par contre une commission du Sénat entendra les rescapés de Parkland.

Cela ressemble bien à une course de vitesse entre la capacité du mouvement des résistants aux armes à maintenir le sujet dans l’actualité (et réussir la marche à Washington) et la capacité de l’establishment à passer à autre chose. La manière dont la société s’est emparée du sujet laisse penser que même si cette fois l’affaire retombe ce ne sera que pour mieux retomber au prix de quelques morts de plus.

 

Pour ceux que cela intéressent mes liens de travail de ce jour.

01/03/2018

http://thehill.com/homenews/senate/376172-senate-gop-rejects-trumps-call-to-go-big-on-gun-legislation

https://www.theatlantic.com/politics/archive/2018/03/guns-second-amendment-repeal/554540/

https://www.theatlantic.com/letters/archive/2018/02/letters-the-toll-of-high-velocity-bullets/554192/ //Le débat est-il inarrêtable?
https://www.motherjones.com/politics/2018/02/walmart-will-raise-minimum-age-for-gun-purchases-to-21-years-old-1/ //Même Wall Mart après Dick’s Sporting
https://www.motherjones.com/kevin-drum/2018/03/donald-trump-goes-off-the-deep-end-on-gun-legislation/ //Trump girouette
https://www.vox.com/2018/2/28/17064120/trump-gun-control-meeting-congress-explained //More of the same
https://www.vox.com/identities/2018/2/28/17059254/gun-control-parkland-florida-shooting-students-national-school-walkout //AMerica ready to go
https://slate.com/news-and-politics/2018/02/the-student-activists-of-marjory-stoneman-douglas-high-demonstrate-the-power-of-a-full-education.html //Beyond guns the evidence of the efficiency of some public high scholl education.
https://www.washingtonpost.com/local/organizers-plan-for-500000-attendees-at-march-for-our-lives-rally-in-washington/2018/02/22/a9ff1992-17f9-11e8-8ac5-84161111ace0_story.html?utm_term=.da3b9a307eb4 //March for our lives
https://thinkprogress.org/frequently-asked-questions-nra-914596980b24/ //Know your ennemy.
https://thinkprogress.org/bank-of-america-firearm-companies-e9aa547dc085/ //Le nerf de la guerre

http://thehill.com/blogs/blog-briefing-room/news/376223-march-for-our-lives-wont-take-place-on-national-mall-due-to

http://thehill.com/homenews/senate/376233-senate-panel-to-hold-hearing-on-parkland-shooting //Une commission pour enterrer e sujet?
http://thehill.com/homenews/senate/376246-senators-introduce-bill-to-ban-bump-stocks //Peut-être un résultat après tout
http://thehill.com/homenews/state-watch/376327-georgia-senate-passes-bill-that-effectively-punishes-delta-air-lines-for //La guerilla

https://talkingpointsmemo.com/dc/democrats-skeptical-of-trump-promises-on-gun-control-try-to-seize-momentum

https://www.motherjones.com/kevin-drum/2018/03/raw-data-mass-shootings-at-schools/

https://www.thenation.com/article/how-the-parkland-kids-are-beating-the-gun-industry/

Après Parkland, Trump en roue libre

Réunion à la Maison-Blanche.

Alors que le débat continue dans le pays et que le mouvement initié par les rescapés de la fusillade de Parkland continue Donlad Trump qui voit s’accumuler les nuages a tenu à occuper le terrain et à tenu à la Maison-Blanche une réunion informelle à l’image de celle qu’il avait tenu quelques semaines auparavant sur l’immigration. Il a tenu durant cette réunion des propos qui ont mis dans l’embarras ses amis Républicains. Il est parfois difficile de comprendre les tenants et aboutissants de la pensée trumpienne dans ses évolutions parfois difficiles à suivre mais à la sortie de la réunion elle semblait pouvoir se résumer.

  1. Donald Trump a exprimé un soutien à une « puissante » extension des contrôles des antécédents des acheteurs qui pourrait passer par le « FixNICS Act » déjà validé à la Chambre des Représentants ou par le projet des sénateurs Toomey (Rep) et Manchin (Dem).
  2. Il insiste sur le contrôle accru des maladies mentales. Cette idée est une vieille lune de la droite qui aimerait bien que la maladie mentale soit l’explication principale des fusillades. L’insistance de Donald Trump sur ce point fait partie de la bataille idéologique sur le thème des armes à feu autant sinon plus qu’une proposition concrète. Mais sa suggestion que les autorités puissent confisquer apriori les armes des personnes suspectées de démence a le double effet de le mettre en opposition ouverte avec ses amis et d’être pratiquement et juridiquement à peu près impossibles.
  3. Le président s’est également dit ouvert au passage à 21 ans de l’âge minimum pour acheter une arme. La NRA est radicalement opposée à cette mesure comme beaucoup de Républicains.
  4. Pour indiquer sa volonté de participer à l’effort il a annoncé voulor signer un décret présidentiel pour interdire les « bump stocks », les accessoires qui permettent de transformer des fusils en armes semi-automatiques. Ses pouvoirs le lui permettent-ils ? Cela n’est pas encore très clair. Cela pourrait donner lieu à contestation judiciaire mais tant qu’il ne l’a pas fait spéculer est inutile.
  5. Par contre il n’a rien dit sur le droit de transporter les armes entre les états qui fait partie des sujets critiques réclamés par la NRA et la majorité des Républicains

Le contexte.

Le contexte ne semble pas avoir évolué de manière substantielle. Après la première vague de dénonciation d’accords commerciaux avec la NRA ce sont les grands de la distribution qui prennent des mesures restrictives. WallMart a annoncé qu’il relevait l’âge de vente des armes et munitions à 21 ans.  Dick’s Sporting Group, gros vendeurs d’armes, en avait fait de même plus tôt et même avait annoncé renoncer à la vente des « armes d’assaut » dans ses magasins.  Cela repose évidemment sur la définition de ce qu’est une arme d’assaut qui n’est pas forcément très claire. quelque part entre ce que nous appelons armes de guerre et armes automatiques.

La persistance du sujet dans les médias montre bien que contrairement aux massacres précédents celui de Parkland a déclenché un processus encore inédit. Cet article sur les dégâts causés par les armes de type AR-15 comme celle utilisée à Parkland (qui est une des plus vendues dans le pays)  témoigne d’une réelle préoccupation dans l’opinion. Le point de départ est le témoignage d’un médecin radiologiste qui a constaté la gravité des blessures causées à Parkland par le fusil AR-15, différentes des blessures causées par les armes légères qu’elle a pu voir précédemment. Un débat réel existe donc bien dans le corps social. Mais ce débat montre dès le début ses limites. Alors que dans un passé pas si lointain la signification du Second Amendement pouvait être interrogée toute discussion aujourd’hui ne peut être que contenue dans les limites imposées par une lecture restrictive de cet Amendement consacrée par l’arrêt de la Cour Suprême qui l’interprète comme accordant le droit individuel aux armes à feu.

Sur le front économique également la tendance se confirme comme en témoigne la décision de la Bank of America de ré-examiner ses relations avec l’industrie de l’armement individuel confirme des mouvements comparables intervenus depuis la fusillade. Cela de devrait pas améliorer la situation boursière de ces firmes qui sont déjà sur la sellette à Wall Street.

Et maintenant.

Comment cela peut-il évoluer ?

La poursuite du mouvement des jeunes pour une plus grande régulation de l’achat, la possession, l’usage et le transport des armes à feu et des munitions sera une des clés. Le mouvement s’est donné lui-même des échéances avec les manifestations qui doivent converger en une grande manifestation à Washington dont le succès est loin d’être assuré. Il n’est pas par ailleurs certain que l’enquête de Robert Mueller ou les événements de politique internationale ne modifient pas radicalement le calendrier et les priorités.

Il devrait malgré rester l’irruption d’une nouvelle classe d’âge dans la vie politique et une inflexion de la discussion politque.

Pour ceux que cela intéresse mes liens de travail de ce jour  :

http://thehill.com/homenews/senate/376172-senate-gop-rejects-trumps-call-to-go-big-on-gun-legislation

https://www.theatlantic.com/politics/archive/2018/03/guns-second-amendment-repeal/554540/

https://www.theatlantic.com/letters/archive/2018/02/letters-the-toll-of-high-velocity-bullets/554192/ //Le débat est-il inarrêtable?
https://www.motherjones.com/politics/2018/02/walmart-will-raise-minimum-age-for-gun-purchases-to-21-years-old-1/ //Même Wall Mart après Dick’s Sporting
https://www.motherjones.com/kevin-drum/2018/03/donald-trump-goes-off-the-deep-end-on-gun-legislation/ //Trump girouette
https://www.vox.com/2018/2/28/17064120/trump-gun-control-meeting-congress-explained //More of the same
https://www.vox.com/identities/2018/2/28/17059254/gun-control-parkland-florida-shooting-students-national-school-walkout //AMerica ready to go
https://slate.com/news-and-politics/2018/02/the-student-activists-of-marjory-stoneman-douglas-high-demonstrate-the-power-of-a-full-education.html //Beyond guns the evidence of the efficiency of some public high scholl education.
https://www.washingtonpost.com/local/organizers-plan-for-500000-attendees-at-march-for-our-lives-rally-in-washington/2018/02/22/a9ff1992-17f9-11e8-8ac5-84161111ace0_story.html?utm_term=.da3b9a307eb4 //March for our lives
https://thinkprogress.org/frequently-asked-questions-nra-914596980b24/ //Know your ennemy.
https://thinkprogress.org/bank-of-america-firearm-companies-e9aa547dc085/ //Le nerf de la guerre

Une diversion trumpienne sur la Corée serait-elle dans les tuyaux ?

L’annonce de la venue, non prévue de longue date à ma connaissance, d’Ivanka Trump avec la porte-parole de la Maison Blanche Sarah Huckabee Sanders, fille d’un ancien prétendant de la droite religieuse à la candidature Républicaine à la  présidence, pourrait bien avoir une signification inattendue. Alors que la Maison Blanche a annoncé il y a quelques jours que les nord-coréens avaient annulé in-extremis une rencontre tenue secrète entre Mike Pence et les dirigeants nord-coréens présents lors de l’inauguration des jeux Olympiques on apprend la venue la Première Fille. Dans un contexte où les affaires du président ne sont pas des plus florissantes on peut s’attendre àà tout et même à un coup de poker qui serait bien trumpien : une relance spectaculaire du dialogue avec Kim-Jong-Un.

Sur le plan intérieur Donald Trump se débat avec la question des armes à feu qui laisse au second plan l’enquêtre de Robert Mueller qui manifestement ne reste pas inactif avec l’accentuation de la pression sur Rich Gates et Paul Manafort. Le premier serait d’aailleurs sur le point de céder et de plaider coupable, donc de parler.

Sur le plan international l’administration Trump fait piteuse figure sur le terrain syrien malgré la rhétorique  anti-iranienne.

Un coup d’éclat diplomatique, mené par le sourire d’Ivanka serait le bienvenu pour la famille. D’autant plus que le voyage de Donald Junior en Inde prend décidément des allures de corruption pure et simple et qu’un progrès sur la Corée ne mettrait pas en opposition frontale avec la Russie , ce que manifestement il ne souhaite pas.

A suivre ?

Après la fusillade de Parkland, un regard sur l’histoire de la NRA.

Qui a dit « Je n’ai jamais cru au port généralisé des armes à feu »?

En 1938, devant le Congrès, Karl Frederick, ancien champion olympique de tir devenu avocat et … président de la National Rifle Association. L’organisation qui est aujourd’hui en tête du combat contre la réglementation de la possession des armes à feu vient de loin et n’a pas toujours été le repaire d’une bande d’extrémistes.

Comme je le pressentais depuis la tuerie de Las Vegas la question des armes à feu aux États-Unis d’Amérique a changé de tonalité. Le tableau complet mérite un examen détaillé qui mérite d’être découpé en plusieurs billets. Nous avons tendance à parler de manière binaire de la NRA et sans mettre en perspective son histoire et son insertion dans l’évolution de la politique et des opinions et nous nous interdisons par là de comprendre les enjeux.

Les origines.

On peut trouver sur Alternet un excellent article, clair et concis sur l’histoire méconnue de cette organisation créée après la guerre de Sécession dont il est utile de rappeler qu’elle est nommée Guerre Civile en version originale. Les deux vétérans nordistes de la guerre voulaient compenser le handicap de pratique des armes à feu du nord  plus urbanisé par rapport aux états plus ruraux du sud. Si la mission de l’organisation a dès le début pris pour cadre le Second Amendement celui-ci n’était pas compris comme il l’est aujourd’hui après le recentrage de 2008 par la Cour Suprême des États-Unis d’Amérique qui a consacré sa lecture comme le principe du droit des individus à l’armement personnel. Il s’agissait du droit à l’organisation armée collective des citoyens contre un état oppresseur (sous-entendu quelque chose comme la Couronne britannique). Pour certains cette manière de voir est simplement révisionniste mais elle aujourd’hui la loi.

L’activité principale des premières décennies de la vie de la NRA a consisté à organiser des clubs de tir permettant la pratique et la formation.

Les années 1920 et l »évolution vers le groupe de pression et les lois de contrôle des armes.

Plusieurs décennies durant la question des armes n’a pas fait polémique. On peut rappeler que la plupart des villes de l’Ouest sauvage des westerns imposaient en fait le dépôt des armes chez le shériff lors de l’entrée en ville. L’assassinat de personnalités politiques (au premier plan Lincoln) renforçait l’accord sur la nécessité d’une régulation civilisatrice.

Au début du vingtième siècle les dirigeants de la NRA participent à l’élaboration de lois fédérale sur le contrôle des armes à feu. Le type même de lois que l’organisation actuelle voue aux gémonies.

L’année 1920 est celle du début de la Prohibition qui déclenche la montée du banditisme associé initialement au commerce clandestin de l’alcool. Cette époque nous est connue par les romans et les films. Elle marque aussi l’irruption des armes automatiques dans la rue avec le massacre de la Saint-Valentin en tête d’affiche. La NRA a donc pris l’initiative de proposer des lois  obligeant à demander un permis pour posséder une arme à feu et punissant de prison les contrevenants. Et même plus : déclarer les vendeurs et imposer un délai entre l’achat et la livraison, des mesures qui sont pour la NRA d’aujourd’hui attentatoires aux liberté élémentaires.

La régulation passait aussi par des taxes importantes destinées à dissuader autant que possible. Ces mesures ont été confirmées unanimement par la Cour Suprême en 1939.

Dans ce cadre Franklin Roosevelt a d’ailleurs intégré le contrôle des armes à feu dans le « New Deal » avec le soutien de la NRA. Cet accord a produit deux lois : en 1934 le National Firearms Act et en 1938 le Guns Control Act (remplacé aujourd’hui par le Guns Control Act de 1968). Le contrôle fédéral est confié à un service du Trésor qui sera progressivement autonomisé pour devenir en 1968 l’ATF (Alcohol, Tobacco and Firearms) toujours au sein de l’administration fiscale. Après le 11 Septembre 2001 le service sera transféré au ministère de l’Intérieur (Department of Homeland Security) en 2002 et le terme Explosifs ajouté à la liste des missions.

Les années 1960, les Droits Civiques et le « coup d’état » de l’extrême-droite.

Le grand tournant dans l’évolution de la NRA se produit au cours des années 1960. Les années de luttes poiur les Droits Civiques laissent des traces. Malgré l’agitation provoquée par la lutte et même l’assassinat de John Kennedy la législation sur les armes ne change pas dans la première moitié de la décennie. Les assassinats de Martin Luther King et de Robert Kennedy semblent avoir joué un plus grand rôle. Les législateurs blancs ont été particulièrement sensibles à la position des Black Panthers qui revendiquaient le droits au port d’armes à feu pour la défense de la communauté noire. Ainsi Ronald Reagan alors gouverneur de Californie pensait qu’il n’y avait pas de raison pour qu’un citoyen se promène dans les rues avec une arme chargée.

En 1968 les contrôles ont été confirmés par une nouvelle loi, le Guns Control Act, qui reprend les règles de l’époque du New Deal. Les thèmes de cette loi sont encore  présents dans le débat actuel : âge minimum légal, santé mentale, interdiction aux repris de justice et aux drogués, traçage des armes par les numéros de série. La NRA a pu bloquer les mesures les plus fortes : registres national et permis fédéral obligatoire. Cette attitude montre une évolution dans la pensée de l’organisation.

L’année 1976, bicentenaire de la guerre d’indépendance, a été le cadre du changement dramatique qui transforme la NRA en groupe de pression extrémiste. L’exacerbation des tensions, entre autres raciales, dans le pays s’est reflété au sein de l’organisation. La création en 1975 d’un groupe de pression spécialisé dans l’intervention législative, l’Institute for Legislative Action, est déterminante. Cet institut est dirigé par un ancien de la Border Patrol, Harlon Carter.  Ce Harlon Carter est connu indirectement de ceux qui comme moi pensent que le grand disque rock de 2016 est l’American Band de Drive-By Truckers. La première chanson de l’opus, écrite et chantée par Mike Cooley, est titrée Ramon Casiano.  Cet adolescent mexicain a été assassiné par Carter qui a été plus tard acquitté pour légitime défense. La position éminente acquise par Carter lui permet dans les années qui suivent d’organiser un coup d’état pour prendre le poste de directeur exécutif de la NRA. L’organisation a depuis cette structure bicéphale. Un président qui assure la façade de représentation publique et un directeur exécutif qui dirige effectivement les opérations et donne le ton militant. Ce poste est occupé actuellement par Wayne LaPierre où il est secondé par la porte-parole Dana Loesch, une jeune femme. Sous la direction du libertarien Carter la NRA prend le visage qu’elle a encore aujourd’hui. et commence à participer au financement des campagnes électorales en même temps qu’elle mène une campagne idéologique autour du Second Amendement. Cette campagne sera couronnée de succès avec l’arrêt de la Cour Suprême fédérale qui valide et fait entrer dans la loi le principe du droit sans réel contrôle de chaque citoyen à posséder des armes. Cet arrêt de 2008 restreint considérablement les possibilités légales de réforme dans le sens d’un contrôle accru étant donné la bigoterie constitutionnelle du pays. Même si l’opinion évolue dans le sens du contrôle revenir sur cet arrêt demandera des années d’évolution des esprits puiqu’une décision de la Cour a force de loi.

La NRA vecteur de l’argent en politique.

Devenu un des premiers groupes de pression la NRA a naturellement fait passer l’argent de ses sponsors naturels les fabricants d’armes vers les candidats aux élections. Assez naturellement elle s’est tournée prioritairement vers les candidats Républicains par affinité idéologique mais aussi par contrainte géographique. Ainsi en 2012 88 % des candidats Républicains et 11 % des candidats Démocrates ont reçu de l’argent de la NRA. Les Démocrates sont en général des candidats de territoires ruraux où il est difficile d »être élu contre le lobby des armes à feu.

L’intervention de l’organisation ne se limite pas  aux élections. Elle tente d’occuper le maximum de terrain social. Elle a par exemple un accord avec les « Boy scouts of America » pour organiser des formations au tir chez les jeunes. Elle propose aussi des assistances pour sécuriser différentes zones comme les écoles.

Avec la libération de la circulation de l’argent dans le système politique par l’arrêt de la Cour Suprême Citizens United Versus FEC en 2010 au nom de la liberté d’expression (on ne ricane pas là-bas au fond) la NRA peut profiter de tous les financements à sa portée. Mais l’industrie de l’armement individuel ne se prote pas très bien. Des regroupements, voire des faillites ou le retrait de certains fonds de pension (en général de retraités de la fonction publique)  de l’actionnariat des fabricants d’armes assombrissent le paysage. Il n’est donc pas étonnant que d’autres pistes aient été recherchées.

La NRA et la filière russe.

Est-ce un hasard si l’actualité nous offre un des plus intéressants court-circuits du moment? Quand tout le pays se pose des questions dur l’ingérence russe dans l’élection de 2016 et la mise en cause fondamentale de la démocratie la piste russe se révèle remonter à plusieurs années dans le passé de la NRA.

Le site d’information sur le débat autour des armes à feu The Trace a ainsi remonté la piste russe.

En 2011 le président de la NRA est présenté à Alexander Torshin, sénateur proche de Poutine en vue de la création d’une sorte de NRA russe nommées Bear Arms par Marina Butina.

Les relations entre  les deux parties ne vont pas cesser. En 2013 Torshin est inquiété par les autorités espagnoles pour blanchiement d’argent mais cela ne l’empêche pas de devenir vice-gouverneur de la banque centrale de Russie en 2014. Les voyages et rencontres bilatérales se multiplient. Torshin et Butina participent à un banquet de donateurs de la NRA.

En 2016 Paul Erikson, vétéran Républicain et membre de la NRA, échange des emails avec un responsable de la campagne de Donald Trump à propos d’un « premier contact » avec Torshin.

En Janvier 2018 le site McClatchy  révèle que l’enquête du FBI  s’intéresse aux efforts de Torshin d’injecter de l’argent dans la NRA pour faciliter l’élection de Donald Trump.

En Février, Ron Wyden, sénateur Démocrate de l’Oregon demande au ministre des finances, Steve Mnuchin, de faire la lumière sur les liens financiers entre la NRA et la Russie.

Du groupe de pression citoyen à la corruption financière.

Le parcours de la NRA examiné avec un peu de recul montre un visage inattendu. Une organisation qui nait dans le désordre consécutif à une guerre civile meurtrière mais surtout dévastatrice pour le sentiment national se transforme au gré des soubresauts politiques et sociaux en machine de guerre de l’extrême-droite et instrument de canalisation de l’argent parfois douteux vers la politique.

Il ne faut pas perdre de vue par ailleurs que la NRA ne représente pas la majorité des possesseurs d’armes à feu du pays ni que ces armes sont inégalement réparties.

Mais la NRA incarne comme d’autres organisations non seulement les tares du système (l’argent roi, les inégalités,…) la profonde déchirure entre les groupes qui font le pays.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Et si malgré tout les réseaux sociaux servaient à quelque chose.

Après la tuerie de  Las Vegas en Octobre 2017 (58 morts 546 blessés) j’ai ressenti dans les réactions de l’opinion et des politiciens aux États-Unis d’Amérique quelque chose de nouveau mais après la fusillade de Floride tout s’est accéléré.

La tuerie de Las Vegas et ce qui change.

Souvenons-nous de la scénographie de ce soir d’Octobre 2017 Côté jardin la sombre haute silhouette de l’hôtel Mandala Bay. A ses pieds le grand espace ouvert de l’espace du concert qui attend son public. Un dispositif ne suffit pas à créer une dramaturgie. Il a besoin de personnage. Caché dans son haut château l’ange exterminateur prépare ses meurtrières alors que la foule des victimes expiatoires, gens ordinaires sans relation avec l’assassin, s’assemble et se réjouit. Rarement, si jamais, une scène de tuerie de masse à la mitraillette aura été si ouverte et si évidente, prête à être reproduite à l’envie sur les tous les écrans de diffusion de masse. Mais cette évidence n’aurait pas suffit si les gens n’avaient pas communiqué en temps réel les images et les sons du massacre. Autant, plus peut-être, que le nombre des victimes la mise en scène médiatique et la diffusion par les téléphones mobiles du vécu de l’intérieur des événements ont changé la perception par l’inconscient collectif.

Les jours suivant la NRA, le lobby des armes, et les habituels soutiens virulents du Second Amendement, se sont montrés curieusement modérés et discrets. La NRA a même fait mine d’être favorable à de nouveaux contrôles sur les achats d’armes à feu. Cela n’a pas duré plus que quelques jours. Comme l’explique « The Trace« , un des sites les plus intéressants parmi les résistants à la furie des armes à feu, l’émotion produite par ces massacres présente un profil particulier. Elle est immédiatement intense après chaque événement mais retombe très rapidement permettant ainsi la récupération par les discours politiques dès que la pression diminue.

La tuerie de Floride et les téléphones portables.

La fusillade de Parkland en Floride la semaine dernière semble à première vue très différente. Entièrement à huit-clos elle n’a pas donné lieu à la reproduction à grande échelle par les médias du théâtre des opérations. La diffusion en direct par les élèves de ce collège Marjory Stonewal Douglas a pris d’autant plus de relief en l’absence d’autres images. Un relief assez grand pour être perceptible jusqu’en France. J’avais remarqué la prestation d’Emma Gonzales, l’élève qui a interpellé Donald Trump pour ses liens avec la NRA. Mais le lendemain mon épouse m’étonne et me raconte la même histoire vue sur France Info. Les nouvelles ont donc été assez fortes pour traverser l’Atlantique. La passion salutaire de la jeune fille nous frappe en plein visage. Mais elle fait plus. Elle rapporte la somme des dons de la NRA pour le président au nombre de victimes et chiffre donc à 5800 dollars par personne le prix d’une vie. Elle personnalise et rend sensible le lien de l’argent politique avec les armes à feu. Les vidéos, parfois brutales, des salles de classe où résonnent les détonations exposent concrètement le déploiement de violence.  Cette violence apportée sous les yeux du plus grand nombre a donné naissance à un mouvement encore embryonnaire de résistance mené par de jeunes inconnus. Ils veulent pérenniser leur action par une grande marche sur Washington. Peut-être s’est-il vraiment passé quelque chose.

Et les Républicains, et la NRA ?

La NRA n’a pas toujours été le lobby qu’elle est actuellement. D’ailleurs la majorité des possesseurs d’armes  (85%) non membres de la NRA seraient favorables à des contrôles renforcés. C’est autour de 1977 qu’une fraction d’extrême-droite y prend le pouvoir de fait tout en laissant les postes les plus représentatifs à des personnalités plus respectables comme Charlton Heston. Mais l’évolution la plus significative est dans doute l’irruption de l’argent de l’industrie des armes qui se met à couler à flot. La NRA peut ainsi plus facilement intervenir auprès des parlementaires pour modeler les lois sans tenir compte de la représentativité réelle de l’association. Et récemment la patte de la Russie dans le financement de la NRA aurait été identifiée par le FBI. comme cible légitime d’investigation.

L’impact de la tuerie de Parkland propagé par les réseaux sociaux et porté par le jeunesse a eu suffisamment de force pour ébranler la muraille Républicaine. Le gouverneur de l’Ohio, John Kasick, un des ténors Républicains les moins virulents, en a profité pour se rappeler au bon souvenir de ses compatriotes en proclamant la nécessité d’une réforme de l’accès aux armes à feu. Mais la confirmation ultime est venu de sa majesté Donald Trump lui-même qui vient de faire dire par le porte-parole de la Maison Blanche que des améliorations des contrôles des antécédents des acheteurs d’armes sont nécessaires. Comme d’habitude cette intervention est motivée principalement par l’opportunisme mais cela même montre combien la question est sensible.  Si la question reste au premier plan des discussions et surtout si la marche des jeunes pour le contrôle des armes à feu se tient il sera clair que les choses bougent. Et pour la première fois depuis des décennies une mobilisation autonome de la jeunesse, hors des encadrements politiques classiques se dessine.

Remarques :

Aussi spectaculaires que soient les tueries de masses elle ne représentent que 4 pour cent des morts par armes à feu dont la plus grande partie consiste en suicides.

La proportion des armes semi-automatiques parmi les meurtres montre que l’interdiction aux civils de ces armes serait une parade efficace.

Quelques sources d’information au sujet des armes à feu et des tueries :

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Et si, pour changer, on parlait de Donald Trump.

Après environ deux années de tumulte, une campagne électorale chaotique et une première année de mandat qui ne l’a pas moins été il est temps de faire l’effort de sortir des postures indignées et de la réaction systématique aux outrances de Donald Trump et de ses amis. Reprendre l’initiative implique de ne pas se cantonner à ces attitudes mais peut-être aussi devons nous tenter de comprendre le tableau qui se dessine devant nos yeux et comment il a pu se construire au fil du  temps.  L’étonnement devant le comportement de Trump comme président nous conduit a nous retourner vers le passé et à interroger les biographies de ses prédécesseurs dans l’espoir d’en tirer des enseignements comme le fait Karen Greenberg dans The Nation.

Un regard en arrière.

S’appuyant sur des ouvrages antérieurs à l’élection de 2016 (« The impossible presidency : the rise and fall of America’s highest office » par Jeremi Suri et « Presidential power and the modern president » par Richard Neustadt) elle nous invite à relire l’histoire de la fonction présidentielle telle que l’évolution du pays la modèle. Elle avance l’idée d’une lente ascension de la fonction qui culmine avec F.D. Roosevelt avant de dégringoler  inexorablement depuis. Que le livre de Suri ait été écrit avant la prise de pouvoir de Donald Trump mais relève les signes avant-coureurs de la crise dans une extension des pouvoirs présidentiels qui déborde le cadre constitutionnel et même démocratique donne à penser.

La première inflexion date de l’élection d’Andrew Jackson, loué par Donald Trump pour d’obscures raisons, le dernier président issu de la génération de l’Indépendance (il n’a que 13 ans au moment du Congrès de Paris mais sa famille a activement participé à la guerre). La population a considérablement augmentée sous l’effet principalement de l’immigration venue d’Europe. L’économie du pays s’est structurée. Jackson donne l’impulsion décisive à la fonction présidentielle en fondant sa légitimité sur le rapport au peuple et l’élection et rompt avec le système antérieur dans lequel elle venait plutôt des textes fondateurs. Il ouvre ainsi l’ère de la « démocratie présidentielle » (à la différence d’une « démocratie avec un président ») dans laquelle le choix ne se fait plus à partir de la cooptation entre les notables de la Nouvelle Angleterre. Jackson a d’ailleurs exprimé son hostilité au Collège Électoral et même au cumul des mandats dans le temps. Propriétaire d’esclaves il a promulgué le « Indian Removal Act » qui institue le parcage des amérindiens dans les réserves et officialise en fait le génocide. Après sa présidence il a soutenu le vol du territoire du Texas. Il l’avait préparé en reconnaissant la sécession de la  République du Texas du Mexique fomentée par des colons esclavagistes le dernier jour de son mandat de président. L’émancipation de la couronne britannique acquise la nation se construit par la politique intérieure et l’affirmation du pouvoir présidentiel.

Lincoln, encore une fois statufié récemment par Spielberg, poursuivra en transformant le drame de la guerre civile, la Guerre de Sécession, en renaissance nationale. Sanctifié par son assassinat Lincoln est ensuite consacré comme un nouveau père d’un pays indéfiniment orphelin par le mémorial de Washington et sa statue monumentale.

L’ascension finale se fait finalement d’un  Roosevelt à l’autre. Theodore, spécialiste de la Marine et ancien participant à la guerre de Cuba, ramène la dimension internationale dans l’exercice présidentiel, suivi par Woodrow Wilson avec la première guerre mondiale. Mais c’est Franklin Roosevelt qui définitivement fait entrer une réflexion globale, mondiale et économique à la Maison Blanche. Alliant la sortie de la crise économique et sociale des années 1930 à la direction politique du monde occidental cette présidence construit l’image que nous connaissons. Mais la complexité technologique du monde, la taille du pays et de sa population ont pour résultat un appareil tentaculaire, en compétition avec ceux des états. La tâche devient alors, selon Suri, insupportable pour un seul homme. Quoi qu’on pense de cette analyse on constate que les successeurs vont gérer la charge chacun avec leurs limites. Truman assure la transition, Eisenhower arbitre pour assurer l’après seconde guerre mondiale. Kennedy tente de retrouver la grandeur par l’hyper-activité et Johnson sombre sous le poids des responsabilités. Quand vient le tour de Reagan il tente de tenir l’image présidentielle en simplifiant la fonction. Et la dégringolade continue avec les suivants dont les Bush.

L’avènement de Donald Trump pourrait donc être une évolution annoncée par la dégradation d’une institution qui a perdu sa force et sa légitimité dans l’esprit des citoyens électeurs.  Le défi réel que poserait alors le symptôme  Trump ne serait pas son remplacement personnel mais la refondation de la fonction présidentielle et de l’ensemble du système de gouvernement.

L’avènement de Donald Trump.

L’arrivée du Donald a été amenée aussi par des évolutions sociales et économiques des décennies précédentes.

Les  réformes de Reagan et le triomphe du néolibéralisme ont préparé l’élection de 2016, facilitée par l’absence de projet alternatif. Même Barack Obama dont l’élégance racée nous a tous séduits n’est pas vraiment autre chose en économie qu’un néo-libéral « modéré ». Même l’Obamacare, système de compromis mis en œuvre dans son état par Mitt Romney quand il était gouverneur, n’est pas une solution intrinsèquement progressiste quels que soient ses avantages car elle ne fait que limiter les dégâts sociaux et ouvre grand la porte aux profits privés sur le dos de la population laborieuse.

La médiatisation croissante de la vie publique parachevée par l’Internet a changé les règles des campagnes politiques sans que les anciens politiciens n’aient encore pris la mesure des changements. Il ne suffit plus d’être télégénique mais il est maintenant nécessaire d’être un bateleur accompli, qui parle à l’émotion avant l’intelligence.

Au total la campagne électorale de Donald Trump s’est déroulée sur quatre phases. L’annonce de la candidature a eu lieu en Juin 2015 mais son positionnement politique, la première phase, s’est étalé sur près d’une décennie. Parti d’une position supposée plus ou moins Démocrate vu sa relation mondaine avec les Clintons et une bonne partie de la bonne société libérale de New-York d’une part et ses positions non-conformistes en matière de mœurs d’autre part il révèle son fond de pensée profondément réactionnaire et même raciste avec l’affaire des « Cinq de Central Park » et la campagne sur le lieu de naissance de Barack Obama qui le positionne comme « nativiste en chef ». Il n’a donc pas de choix il ne peut venir en politique que sous l’étiquette Républicaine. Les récentes déclarations de Donald Junior avec les allusions à McCarthy et aux communistes  montrent de plus que la culture politique de la famille est résolument ancrée très à droite.

Dès la déclaration de candidature le ton est donné. La campagne sera offensive, voire offensante, anti-immigrés, anti-élites, en deux mots populiste de droite. Trump déploie consciencieusement ses thèmes personnels dans cette phase qui précède les primaires. Elle lui a permis d’imposer les thèmes de la campagne, pas ceux qui allaient faire les grands débats mais ceux qui allaient faire la différence dans les franges critiques de l’électorat, les quelques pour cents qui emporteraient les états critiques de la Rust Belt. Imposant ses thèmes à des contradicteurs qui ne  jouent pas ce jeu dont il impose les règles et qu’ils ne comprennent pas il les contraint à réagir au lieu de développer positivement leurs propres thèmes.

Et là le jeu change. Lors des élections présidentielles la campagne des primaires devient de plus en plus la réelle campagne électorale et dure plus longtemps (de Février à Juin et même aux Conventions de Juillet ou Août ). En 2016 du fait du nombre de candidats et de la volonté même de Donald Trump cette campagne des primaires Républicaines a été essentiellement un spectacle, un spectacle d’estrade diffusé sur les écrans. On se souvient des prestations de Trump qui élimine ses concurrents Républicains l’un après l’autre avec suffisamment de brio pour garder la main et être en mesure de choisir son vice-président et de gagner la Convention sans se laisser imposer quoi que ce soit par les instances du parti.

Conformément au scénario établi depuis des années la campagne officielle, entre les Conventions et le jour de l’élection, a été moins riche en événements que les phases précédentes. Les débats télévisés face-à-face ont montré un Donald Trump moins à l’aise dans l’exercice qu’il ne l’était dans le pugilat sans contrainte des débats des primaires qu’il dirigeait de fait. Hillary Clinton a ainsi pu paraître gagner ces débats pour ceux qui les ont évalués sur les seuls critères du débat d’idées et de l’argumentation. On sait maintenant que ce jeu-là n’était pas le bon, que l’élection ne s’est pas jouée sur la logique.  Au bout du compte cette période a surtout été marquée par les interventions de James Comey qui ont pu avoir un effet sur le résultat (Kevin Drum de Mother Jones a mis en évidence un effet probable des deux interventions de Comey sur les sondages). La faiblesse politique de Clinton mariée au président qui a initié l’accord de libre-échange nord-américain et restait marquée par ses attaches avec la finance ne lui permettait pas de réunifier l’électorat Démocrate ni de retenir les électeurs attirés par le populiste de son adversaire.

La première année du président Donald Trump.

Le bilan de la première année de la présidence est connu. Donald Trump et les Républicains ont dépensés des mois a tenter d’abolir l’Obamacare en vain.  L’enquête de Robert Mueller sur l’ingérence russe est venue obscurcir le paysage. Au fil des mois l’action du président a rejoint les thèmes classiques du Parti Républiain et Trump a largement renoncé à ses promesses de campagne. La fin de l’année a vu se finaliser complètement l’accord entre les deux avec le vote et la promulgation de la réforme fiscale. Trump a donc conquis le parti en s’alignant. En échange les Républicains protègent Trump des attaques des enquêteurs à propos des relations de la campagne de 2016 avec la Russie mais également des investigations sur la famille Trump et ses finances qui pourraient constituer le réel point faible.

La prédominance de la Maison-Blanche dans le système politique préserve à Trump un avantage. L’instabilité de l’ensemble reste forte  du fait de l’imprévisibilité de Donald Trump mais aussi du poids des militaires faucons  (Kelly, McMaster) dans son entourage. Ils sont les vrais maîtres de la politique étrangère et aggravent le risque de conflit en cas d’incident fortuit (Corée, Iran, Syrie).

Sauf événement de ce genre les élections de mi-mandat en Novembre seront le moment de vérité. Si le Parti Républicain paie dans les urnes le prix (comme le suggère Jeet Heer dans un article récent de The New Republic) pour avoir sauvé le soldat Trump l’ensemble de l’édifice pourrait s’écrouler.

 

 

 

 

A propos du mémorial de Lincoln, quelques images.

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